mardi 30 mars 2010

Une nouvelle semaine

Quel plaisir que de penser un dimanche soir "demain je ne vais pas au boulot". Ouais... plaisir vite entâché par l'idée suivante : "demain j'entame une semaine de révisions intensives". Youhou !
Ne vous méprenez pas, je n'ai pas une semaine gratuite comme ça pour réviser, j'ai bien évidemment posé 5 jours de congés pour ça. On peut donc être amené à se poser plusieurs questions. Je vous ai déjà parlé du nouveau "système" d'organisation pour l'externat à PetiteVille, à savoir une moitié de promo en stage pendant que l'autre est en cours, puis on intervertit. Ce qui veut dire, par rapport aux examens, qu'un groupe a 2 mois de cours puis 2 mois de stage juste avant les examens (c'est mon cas), et donc c'est cool d'un côté puisqu'on a les cours bien avant on peut donc "prendre de l'avance", mais d'un autre côté on est bien embêté quand on est en stage juste avant les examens, parce que ce n'est pas évident de bosser en rentrant le soir après une journée de boulot. Mais dans l'autre sens, si on est "tranquille" pour réviser juste avant les examens, on a les cours juste avant ceux-ci donc on n'a que 2 mois pour tout apprendre... du coup je ne sais pas quel schéma est le plus propice à la réussite des examens. Pour ma part, je dirais qu'avoir les cours juste avant les examens est mieux puisque je suis plutôt du genre "gros-coup-de-taff" final. Enfin on verra. J'ai au moins l'avantage d'avoir fait un stage dans un service de cardio, et oh ! surprise, j'ai l'exam de cardio dans 2 semaines. Ca me confère un (léger) avantage.

Sinon, ma semaine s'est pas trop mal passée, même si c'est vrai que c'est moins agréable d'aller bosser seul (mon co-externe et ami ayant pris la semaine dernière pour réviser). Bon les deux D4 étaient là mais elles ne restent que le matin. Et puis je n'ai pas les même rapports avec elles. A noter dans les faits méritant d'être racontés :
 - ma 1ère tentative de gaz du sang. Il s'agit d'un prélèvement de sang artériel (et non veineux comme lors d'une prise de sang habituelle), qui vise à explorer l'oxygénation et d'autres paramètres modifiables par la ventilation (on y mesure entre autre le CO2 dissout (acide), les bicarbonates (basiques), l'oxygène, et le pH du sang (son acidité)). Le geste est assez technique puisqu'on ponctionne une artère, qui est un tuyau sous pression (c'est une artère qu'on palpe pour prendre la pouls, et non une veine qui est un tuyau sans pression). La patiente venait d'être emmenée par le SAMU et était en bradycardie sur dysfonction sinusale (pour les initiés). Sa fréquence cardiaque était à 30/min environ (autrement dit un battement de coeur toutes les 2 secondes !). Malgré tout je sentais parfaitement bien son artère radiale (au poignet), et après hésitation je finis par piquer droit dedans... mais pas la moindre goutte rouge dans la seringue. Merde ! Alors je vais un peu plus profond, je remonte un peu, je bouge à gauche à droite, sans dépiquer... toujours rien. Au bout d'un long moment de solitude, un infirmier prend la relève et tente de trouver l'artère sans dépiquer. En vain. Un 2ème infirmer dépique et repique. Toujours rien, alors qu'on sentait tous très bien le pouls... finalement, le chef qui commence à être agacé prend une seringue, pique, et c'est torché en moins de temps qu'il ne faut pour le dire. Classe ! Bon, ce qui me rassure c'est que 2 infirmiers expérimentés n'aient pas réussi. Je retenterai ma chance sur un patient plus facile !
 - un patient comme on les aime, amené pour une grosse détresse respiratoire sur une décompensation cardiaque, passé pas très loin de l'autre bout du tunnel. Quand il va mieux l'interne lui explique qu'il a failli mourir et qu'on l'a sauvé, il répond "mais non !". Une lumière. L'interne lui répète tous les matins qu'il a eu chaud, et lui répond un beau matin "mais moi je m'en fous du coeur, ce qui m'embête c'est de savoir si j'ai un cancer de la gorge parce que j'ai mal à la gorge". Il y a des gens comme ça qui ont un de ces sens des priorités... Finalement lorsque le chef lui réexplique pour la énième fois ce qui s'est passé il répond "mais on ne me l'avait pas dit !". Garder son calme, éviter les insultes qui vous viennent à l'esprit. Heureusement qu'à côté de ça d'autres patients sont vraiment (et non ironiquement) des perles et sont reconnaissants qu'on leur ait sauvé la vie... ça aide à garder l'envie de continuer.
 - mon 1er constat de décès. Un patient qui était là depuis début décembre, qui avait fait un arrêt cardiaque, récupéré mais qui n'avait eut aucune réanimation pendant 15 minutes (temps d'arrivée des pompiers), et qui avait donc le cerveau HS, s'est finalement arrêté jeudi matin. Ca fait un peu bizarre puisqu'il était là depuis le début de mon stage, il occupait donc la chambre à lui tout seul, c'était "sa" chambre", du coup vendredi quand j'ai vu quelqu'un d'autre dedans c'était bizarre. Et puis ce qui était bizarre aussi (oui je sais, bonjour les répétitions), c'était de le voir lui, sans toutes les machines qui l'assistaient (en particulier le respirateur). Je l'ai à peine reconnu. Finalement je me suis rendu compte que je l'avais vachement déshumanisé quand il était hospitalisé. Probablement un moyen de protection, j'en sais rien. Je pense que quand on soigne quelqu'un comme ça, même si ça reste dans un petit coin de notre esprit, on ne peut pas se permettre de penser que c'est un père de famille, un mari, un fils, un ami, un collègue... sinon ce n'est pas supportable. Qu'en pensez-vous ? Je m'adresse à tout le monde mais particulièrement aux externes qui lisent ce blog (je sais qu'il y en a). Je disais donc "constat de décès" puisque même quand ça parait évident, un médecin doit vérifier qu'effectivement la personne est bien décédée. On ne mord plus les orteils comme le faisaient les croques-morts je vous rassure (c'est un peu sale et je ne pense pas que ça soit médicalement suffisant...). Là, l'interne a testé le réflexe cornéen (on touche la cornée avec un coton, la paupière doit en théorie se fermer si la personne est vivante).
 - la 1ère personne que je vois électrisée. Et oui, on dit "électrisé" quand on s'est pris un "coup de jus", et "électrocuté" quand on en est mort. C'est du français messieurs dames ! Un jeune monsieur qui a touché la ligne haute tension en portant un tôle sur un toit (sur son lieu de travail). Quand on s'électrise, il y a un point d'entrée et un point de sortie (qu'il faut donc rechercher évidemment). Là l'entrée était au niveau des deux mains (une bonne partie des doigts étaient brûlés au 3ème degré), la sortie au niveau d'un pied seulement (brûlé en partie lui aussi). Il a passé 24 heures dans le service pour surveiller son coeur bien entendu. Heureusement pour lui, à part ses brûlures il n'avait rien.
 - une autre perle. Un monsieur, la quarantaine, qui samedi dernier tombe brusquement, inconscient, bleu. Sa femme prend le pouls, qu'elle ne trouve pas. Elle fait donc un massage cardiaque pendant 5 petites minutes, le mec reprend conscience. C'est là le meilleur : il ne fait rien. Il ne va chez son médecin traitant que 3 jours après, qui lui dit évidemment d'aller à l'hôpital. Pas inquiet, il a failli crever, il s'en fout, il est là ! Bon petite explication quand même pour ceux qui comme moi n'ont pas compris. Pour ceux qui ne le savent pas, il n'y a que dans les films que quelqu'un se réveille comme une fleur après un semblant de massage cardiaque de 2 minutes. Le coeur, pour se "réamorcer", a besoin, en fonction du type d'arrêt, soit d'un choc électrique, soit de médicaments (adrénaline). Il ne peut pas reprendre tout seul avec juste un massage cardiaque. La femme de ce monsieur a donc probablement mal pris le pouls (ce qui à sa décharge n'est pas évident surtout si le coeur est lent, faible, ou fait des "pauses"). En fait, ce monsieur a probablement fait un ictus laryngé, autrement dit une contraction réflexe des muscles de la gorge puisqu'il a apparemment "avalé de travers" juste avant (c'est ce qui arrive par exemple quand on se noie). Bref, tout ça pour dire que si un truc pareil vous arrive, faites le 15 tout de suite, même si la personne reprend conscience après ! Ca semble évident mais visiblement pas pour tout le monde...

Voilà les fait marquants de la semaine. La semaine qui vient sera nettement moins palpitante, mais peut être que mon imagination me permettra de vous pondre un article tout frais. Je garde sous le coude une petite anecdote de mes dernières vacances (Noël).

Sinon, pour vous faire réfléchir, la coût d'hospitalisation en USIC, comme en réa, est d'environ 2000€ par jour. Quel que soit le service d'hospitalisation, il reste à la charge du patient le forfait hospitalier de 12€ par jour (moins une part prise en charge par une éventuelle mutuelle). Si on prend comme exemple le monsieur décédé jeudi qui était là depuis un peu plus d'un mois (comptons un mois ça sera plus simple), 2000x30 soit 60 000 euros, et "seulement" 12x30 soit 360€ à la charge du patient si tant est qu'il n'ait pas de mutuelle. Soit 60 000-360 = 59640 euros à la charge de la sécu. Qu'on vienne se plaindre de notre système de sécurité sociale !
Sur ce, bonne semaine aux travailleurs (et un peu aux autres aussi quand même ;-) ).

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