mardi 15 juin 2010

Encore une garde aux urgences chir

                                                            MRI Bot, Rhonda Ratray

Il est grand temps que je vous conte les dernières anecdotes vécues la semaine dernière, lors de deux petites gardes, l'une aux urgences d'un hôpital, la deuxième aux urgences d'un autre hôpital.

Deux petites gardes chapardées auprès de deux collègues désireux de s'en débarrasser, l'une sans échange, l'autre me permettant de libérer mon mois de juillet et donc de pouvoir partir quelques jours loin de PetiteVille qu'importe la destination.

Mais commençons plutôt par la 1ère. Beaucoup de mes collègues vendraient pères et mères pour être en garde côté chirurgie plutôt que du côté médecine. Ce qui se comprend puisqu'il est vrai que le rythme est quand même *un peu* moins soutenu, et surtout on nous laisse faire pas mal de choses, comme les sutures, les plâtres... c'est sûr que c'est nettement moins fun de faire un toucher rectal chez un papy dément et confus adressé par la maison de retraite !
Au début, il n'y avait pas grand monde et tous les patients avaient déjà été vus. L'interne de journée était sympa et m'a conseillé d'aller voir un patient dont la sémiologie était intéressante.

Puis, une infirmière m'a demandé de surveiller un patient d'une soixantaine d'années amené pour un AVC hémorragique de la fosse postérieure. Il devait monter en réa pour y passer la nuit. Evidemment dans ces coups-là, c'est quand même plus sympa de discuter avec le patient plutôt que de rester silencieux les yeux rivés sur le scope pendant une heure... Et bien ce monsieur était un dentiste récemment retraité, qui avait fait ses études à PetiteVille dans la même promo que notre (très) cher doyen de la faculté de médecine. Autant dire que la conversation s'est révélée forte intéressante, et le monsieur, bien qu'ayant quelques difficultés à articuler, était bien sympathique.

Ensuite est arrivé un autre patient. Personne (dans le corps médical j'entends) ne l'avait encore vu. Quand j'entre dans le box, il a son pouce qui trempe dans un bain de bétadine. "Ca, ça sent la suture". Je commence à poser les questions habituelles, mais au bout de trente secondes je suis interrompu par l'interne qui vient voir le patient. Pas d'interrogatoire, il veut voir directement la plaie (ben ouais c'est un chir, on voit la chair, on discute après, question de principe). Oh my God ! ce n'est pas une plaie banale, il manque en fait la moitié de la phalange distale (la dernière, celle où il y a l'ongle) du pouce ! Ce bricoleur du dimanche était en train de couper du bois avec une scie circulaire, et comme il le dit si bien "il a poussé le bois un peu trop loin". Résultat, son pouce était ouvert en deux, on aurait dit une langue de serpent. Du coup, à cause de la perte de substance, l'interne a préféré appeler les ortho plutôt que de suturer lui-même.

Un peu plus tard dans le soirée, je retrouve un patient rencontré lors de mon précédent stage en CMF (chir maxillo-faciale). Celui-ci a une plaie interne au niveau de la lèvre inférieure, due à la radiothérapie apparemment, qui a saigné abondamment dans l'après-midi. En plus, ses cicatrices au niveau du coup sont purulentes (il s'agissait d'un patient traité pour un cancer de la cavité buccale, qui avait subi deux reconstructions en CMF, d'où les cicatrices. De plus, il est trachéotomisé de longue date mais ne peut plus parler à cause d'un oedème depuis peu). A noter qu'il avait été vu la semaine précédente par la PH de CMF, une de mes chefs a-do-rées pendant mon stage, qui malgré l'épouse qui l'avait prévenue de l'aspect des cicatrices, n'avait pas daigné soulever les pansements pour les voir. L'interne appelle donc le chir d'astreinte en CMF, qui passera donc le voir plus tard. Sauf que ce qu'on ne savait pas, c'est qu'à l'arrivée de ce patient aux urgences, quelqu'un avait apparemment appelé cette fameuse PH.

Et c'est là le meilleur. La voilà qui débarque aux urgences, et qui incendie sur place l'interne de garde, comme quoi c'est lamentable que ce monsieur bien connu dans son service patiente aux urgences et qu'il ne soit pas directement envoyé en CMF, parce qu'elle elle était au bloc (ben ouais, elle bosse ELLE) et que le message laissé sur son portable ben elle a pas pu l'écouter avant (message laissé vers 18h30, là il devait être 21h30 je crois). J'ai admiré l'interne qui est resté tout calme et qui lui a juste gentiment répondu que dans tous les cas les cicatrices étaient déjà purulentes lors de sa consultation et que le patient n'aurait pas eu à venir aux urgences si elle y avait prêté attention... Et tandis que nous changeons de pièce, "nan mais c'est qui celle-là ??? elle est tarée ?" "ouais... j'ai passé 2 mois en CMF :-("

Pendant ce temps-là, elle était en train de râler auprès des brancardiers des urgences, qui étaient occupés avec d'autres patients (on est aux urgences quoi...), parce que son patient devait monter TOUT DE SUITE, on s'en fout de le mettre tout de suite sous antibio, on s'en fout des autres patients, c'était une question de priorité monarchique.


Au total, malgré un début plutôt calme, le service s'est bien rempli pendant la soirée, et d'ailleurs mon collègue de nuit n'a apparemment pas pu aller dormir. Ma deuxième garde de la semaine était plus intéressante, mais ça, vous le lirez dans un prochain post ;-)

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Une chose m'échappe: pourquoi es-tu persuadé de l'infériorité des chirurgiens par rapport aux médecins spécialistes?

L'Apprenti Docteur a dit…

Qu'une chose soit dite (et je l'ai déjà dit précédemment), même si je les raille souvent, je respecte tout à fait les chirurgiens et ne les dénigre pas du tout.

Je ne fais que m'amuser de leur fréquente prétention, on a souvent l'image du médecin qui se prend pour Dieu, le chirurgien en est l'archétype. Evidemment ce n'est pas une généralité.

D'ailleurs, mon anecdote dans cet article montre ce que j'explique là, la chirurgien qui arrive comme un cheveu sur la soupe, qui gueule sur l'interne qui est seul à gérer les urgences chirurgicales (et qui en plus, gérait plutôt bien !), et qui veut que tout le monde soit à ses pieds pour prendre en priorité SON patient.

Beaucoup des chirurgiens que j'ai côtoyé jusqu'à présent renvoyaient une image de "je suis le chirurgien, moi, et je suis le meilleur". Alors il est vrai que pour faire de la chirurgie, il faut arriver bien classé à l'ECN, tout comme pour faire une spé med d'ailleurs.

Ceci dit, les chirurgiens disent très souvent d'eux-même (soit en rigolant, soit avec sérieux) qu'ils ne sont pas médecins et qu'ils ont tout oublié de la médecine (ce qui se comprend parce que le cerveau ne peut emmagasiner 6 ans de médecine + 6 ans de chirurgie...). Combien de fois pendant une garde un chir m'a dit qu'il en avait rien à cirer de l'ECG et qu'il était chirurgien, pas médecin !

Tout ce que je fais dans mes écrits sur ce blog, c'est caricaturer ce trait particulier du caractère de nos chers charcutiers, sans leur manquer de respect et toujours au second degré.

Je n'ai aucunement pour but de les dénigrer, et d'ailleurs, je serais bien mal placé n'étant (pour le moment) qu'un petit externe !

J'espère que cette explication te conviendra :-)

Derek a dit…

Mais non te justifie pas, de toutes façons les chir c'est tous des cons.

*Fuit en ricanant sous les jets de pierres*

L'Apprenti Docteur a dit…

@Derek : fuis mon ami, fuis, pendant qu'il est encore temps !
Pour ma part, je reste dans le politiquement correct. :-)

Anonyme a dit…

Les Chirurgiens sont les meilleurs.
C'est un fait .

Les jalouser ne fait que confirmer ce fait.

Merci pour eux :)

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