vendredi 7 octobre 2011

Du haut de mes 22 ans et des 5 ans de médecine derrière moi, je vous le dis : je ne veux pas de ce système

Densité médicale selon l'Atlas de la Démographie Médicale Française 2011 du CNOM

Deux articles en deux jours, vous ne pouvez que me féliciter ! Ca valait le coup d'attendre non ?

Aujourd'hui on va causer un peu politique. Mais attention hein, on n'est pas là pour se chauffer les oreilles et donner son point de vue en gueulant plus fort que les autres. Je vais rebondir sur un sujet qui fait beaucoup écrire en ce moment sur internet, sur divers blogs médicaux ou même sur twitter.

Vous n'êtes pas sans savoir que dans quelques jours ont lieu les primaires socialistes. L'occasion pour nous de profiter des idées des candidats qui se voient tous déjà Président de la Répubique. On n'est pas ici sur un blog politique, je vais donc parler de ce qui nous intéresse le plus ici : leurs conceptions de la santé, et les mesures qu'ils promettent de prendre en cas d'élection. Et le grand sujet actuel au sein de ce vaste chantier qu'est la santé, c'est la résolution des inégalités de démographie médicale sur le territoire français.

Autant vous le dire tout de suite, je suis absolument contre leurs propositions actuelles, et d'autant plus outré des arguments avancés pour les justifier. Laissez-moi vous expliquer mon point de vue !


Grosso modo, le débat revient à se décider entre mesures incitatives ou coercitives. Est-ce qu'on incite (plus ou moins fortement) le jeune, beau et vaillant Dr Lapprentidoc (si si cette description me sied à merveille !) à aller bosser à Trifouilly-les-oies, parce qu'il n'y a pas de médecin à 20km à la ronde, ou est-ce qu'on oblige ce même praticien à le faire, sans lui laisser le choix ? Pour Martine et Arnaud, il n'y a pas photo, il faut obliger les médecins à travailler où on leur demande. Nous reviendrons après sur ce sujet, mais passons maintenant aux arguments avancés pour justifier cette prise de position.

On l'entend maintenant quasiment tous les jours, à la radio, à la télé, ou on le lit dans la presse, sur twitter : les études de médecine sont gratuites et payées par le contribuable, donc le docteur fraîchement diplômé doit "rembourser" sa dette.

Oh putain. Je reviens, je vais me défouler 5 minutes sur un punching ball histoire de pas fracasser mon PC devant une connerie démagogique pareille (j'suis complètement has been, je n'ai pas de Mac).

Reprenons. Les études de médecine sont gratuites ? D'une, sans commune mesure avec le système américain, on peut estimer le coût des frais d'inscription de la première à la dernière année de médecine à un peu plus de 3000€ (je n'ai pas compté les frais d'inscription à une sécurité sociale étudiante de la 1ère à la 3ème année, puisqu'après étant salarié nous cotisons au régime général). Ca ne me semble pas négligeable, même si bien sûr c'est anecdotique comparé au coût réel de la formation d'un étudiant quel qu'il soit. Je ne parle pas du coût des livres et autres conférences qui se monnayent au prix cher, puisque ces dépenses ne sont pas obligatoires, bien qu'indubitablement nécessaires.

De deux, nous sommes en France. En France, corrigez-moi si je me trompe, mais toutes les universités (à part la Catho de Lille mais qui n'est pas réellement une université, mais bien une fédération de facultés, écoles supérieures et instituts de formation) sont "gratuites" au même sens que les facultés de médecine. Un étudiant en droit, en biologie, en lettres, ou en sports ne paye ni moins cher, ni plus cher son inscription universitaire. En gros, à part les écoles privées, en France, toutes les études sont "gratuites". Alors pourquoi montrer du doigt les études médicales, genre "putain Ginette, les mecs sont formés avec nos impôts et ils veulent pas aller bosser où on leur dit d'aller ?". Je disais donc démagogie.

Et surtout, surtout, s'il y a des étudiants qui remboursent largement leur dette à la société, c'est bien les étudiants en médecine. Je ne parlerai que de l'aspect pécuniaire de la chose puisqu'au fond c'est tout ce qui intéresse ces têtes bien pensantes. Le reste n'est que pour faire joli.

Vous le savez probablement, à partir de la 4ème et jusqu'à la 6ème année, nous sommes promus "étudiants hospitaliers" (bien souvent appelés "externes", mais le terme n'existe plus dans la loi depuis plus de 40 ans). A ce titre, nous sommes rémunérés avec le dos de la cuillère, entre 100 et 250€ net par mois, pour un mi-temps. Nos gardes sont payées 20€. Au final, ça fait grosso modo du 2,5€ / heure de travail. Mais bon, certains diront que c'est déjà bien pour un étudiant, et que certains ne le méritent pas de toute façon parce qu'ils ne foutent rien en stage, et blablabla. Pour ma part, étant donné que je m'investi toujours pleinement en stage et en garde, je pense mériter largement ce minable salaire.

Mais le pire est à venir. L'internat qui commence à la 7ème année, est souvent attendu par les étudiants car synonyme de "médecin", en cela que l'interne peut prescrire, et amène avec ces responsabilités un salaire qui permet de vivre, et non plus de survivre. Le traitement de base évolue de 1200€ la 1ère année d'internat, à 1800€. Fait chier, c'est pas encore là que je pourrai me payer cette magnifique Maserati GranCabrio. Certes, pour beaucoup, 1800€ ça parait déjà bien. Mais c'est sans considérer la réalité de l'internat. En fait, tout est dans le nom. Un interne, ça vit à/pour/dans l'hôpital. Sans parler des gardes, l'activité de l'interne s'étale sur 11 demi-journées. Ca signifie le samedi matin aussi. Mais ce n'est pas le Trésor Public (j'ai des soucis avec eux en ce-moment, donc je vide mon sac ;-), c'est pas 10h-midi et 14h-15h30. Hors garde, l'internat c'est la plupart du temps 10 à 12h/jour, avec un repas pris sur le pouce en milieu d'après-midi (quand il y a un repas). On est déjà à du 50h/semaine grand minimum (je dis bien GRAND minimum). Les gardes se rajoutent à ça, et leur nombre varie bien sûr en fonction des services. Ca peut aller grosso modo de 3 gardes/mois (chanceux), à 3 gardes par semaine (je pense notamment à un service de réa où je discutais de ça avec l'interne lors d'une garde l'année dernière), en plus de l'activité normale de l'interne. Autrement dit, pour la majorité de ces jeunes médecin, la semaine c'est pas 35 mais bien 70h/semaine. Reprenons donc notre calculatrice : imaginons un interne "moyen" qui fait donc 10h/jour 5,5 fois par semaine, qui est de garde 4 fois en semaine (soit à peu près + 100€ x4 = 400€) et une fois un dimanche (24h de garde pour 200€). Soit un salaire net de 2400€. Soit un nombre d'heures d'environ 327 sur le mois. Soit un taux horaire de : 7,33€/h net. Le Smic actuel est à 7,06€/h net. Pour, je le rappelle, un nombre d'heures plutôt "moyen", il y en a qui font moins, mais beaucoup font bien plus.

Je trouve que c'est plutôt pas cher payé pour quelqu'un qui prend soin de votre santé au détriment de la sienne. Juste comme ça, quand le soir vous êtes au chaud chez vous affalé devant la télé, ou le week end quand vous profitez de votre famille, pensez à tous ces gens qui sont eux en train de bosser (que ce soit les médecins ou les autres professionnels de santé, ou tous les services comme les pompiers, policiers etc.). Ca m'arrive souvent de me dire "je suis bien là quand même, alors que mes collègues bossent".

Je pourrais continuer sur les praticiens hospitaliers ou les généralistes et spécialistes en libéral, mais ça risque de faire beaucoup de calculs. Cependant, je vous invite à lire l'article de Borée sur le sujet, qui décortique sa trésorerie de jeune généraliste en campagne. Je pourrais continuer en disant que les libéraux sont taxés à outrance sur leur chiffre d'affaire, ce qui contribue également à rembourser la "dette des médecins envers la société".

Ca fait beaucoup de discussion sur l'argent, mais c'est bien de ça dont parlent les politiques, c'est là-dessus qu'ils s'appuient pour justifier leur discours.  Je préférerais mille fois parler de la dimension humaine et de l'investissement personnel que ce métier représente, mais ça n'intéressera pas Arnaud ou Martine.

Je ne me plains pas des contraintes de ce métier parce que je l'ai choisi en connaissance de cause. Mais je pense par contre qu'il est intolérable et blessant de stigmatiser ainsi une profession déjà bien souvent prise à partie, en dépit de l'investissement parfois supra-maximal des praticiens (burn-out et autres suicides). Les politiques essaient encore une fois de faire passer les médecins pour des nantis intouchables et privilégiés qui veulent gagner du fric et ne pensent pas à la santé des gens. Genre "putain les connards ils sont blindés, ils roulent en Porsche mais personne ne veut aller bosser à Meyrignac L'église en Corrèze!" (village de 52 habitants choisi au pif sur Google Maps, désolé si quelqu'un de là-bas me lit :-).

Nous arrivons sur le marché du travail en tant que Docteur grosso modo à la trentaine (plus ou moins en fonction de nos éventuels redoublements et surtout des spécialités). Un âge où l'on construit en général sa famille. Un achat immobilier, un PACS/Mariage, des enfants, un chien, un monospace... Et voilà que Martine veut, après ce parcours du combattant que vous avez finalement terminé, vous faire signer un contrat vous obligeant à bosser là où elle le décide, pendant 5 à 10 ans. Ah ben oui, tant pis pour ma vie personnelle (et professionnelle d'ailleurs), c'est d'où qu'on signe ?

Moi, ma compagne est web-designer. Pas médecin. Pas mère au foyer. Elle va faire quoi à Meyrignac ? C'est sûr qu'il doit y avoir une agence de com' et un marché dans le milieu de l'internet de MA-LA-DE là-bas. Dans 3 ans c'est sûr, sa boîte est cotée en bourse. Les enfants, pourquoi les mettre à l'école, ils n'ont qu'à être scolarisés à la maison, ou alors à l'internat ! T'as une lettre à poster ? T'inquiète, le facteur passe 3 fois par semaine. Des courses à faire ? Prends ta Porsche, t'en auras pas pour très longtemps pour faire les 50km jusqu'au supermarché. L'Etat se désengage inexorablement de nos campagnes, où les services publics deviennent inexistants, et notamment les hôpitaux ! On entend de plus en plus souvent parler de fermetures de services dans les hôpitaux périphériques. Mais ça ne gêne pas certains politiques d'aller planter un glandu là-bas sans lui demander son avis sous prétexte qu'il nous doit bien ça, on lui a payé ses études.

Il est évident qu'il faut trouver des solutions à ce problème de "déserts médicaux". Mais plutôt que de nous pondre un ramassis de conneries pareil, je pense qu'il serait plus intelligent de travailler en collaboration avec les 1ers concernés (hors mis le patient bien évidemment), les médecins, qui seront plus à même de proposer des idées satisfaisant les besoins en terme de santé publique et les médecins.

Les autres candidats, et notamment François, préfèrent proposer des mesures incitatives. Ce qui me gêne dans les idées de François, c'est de vouloir interdire l'installation là où il y a "trop" de médecins. Forcément, ils seraient ainsi obligés de s'installer là où il en manque. Seulement, je ne partage pas l'idée du "trop". Certes, sur la côte d'Azur ou en région Rhône Alpes la densité médicale est très bonne. Cependant, peut-on dire qu'il y a trop de médecins ? Cela signifierait que certains n'ont pas de travail non ? Je ne pense pas que des médecins soient au "chômage technique".

Finalement, (et croyez-moi je souffre d'écrire ces mots), c'est Ségolène qui me convainc le plus, avec son idée de "dispensaires de médecins salariés". Une idée à creuser je pense.

Ainsi, parce qu'il faut bien que je m'arrête un jour, je commence, comme beaucoup de mes collègues, à être sérieusement agacé par ces prises de position populistes et sans fondement. J'attends le jour où un politique prendra vraiment la problématique de la santé à bras le corps, parce qu'au delà du sujet qui m'anime aujourd'hui, il y a des tas de choses au moins aussi importantes à changer et améliorer dans notre système de santé.

J'ai écrit cet article avec la fougue et la vision de la jeunesse. Peut-être que je l'ai mal écrit, que vous ne saisissez pas bien mon propos et le cheminement de ma pensée. Peut-être que je suis complètement à côté de la plaque. Mais il n'empêche que je suis le principal intéressé dans l'histoire, puisque je suis le médecin de demain. Je suis celui qui dans quelques années devra faire le choix entre les différentes carrières qui s'offrent à lui. Je suis celui qui "vous aidera, vous soignera" comme dit Arnaud. Et moi, du haut de mes 22 ans et des 5 ans de médecine derrière moi, je vous le dis : je ne veux pas de ce système. Il n'est pas juste, il n'est pas bon.

Merci à Martine, Ségolène, Arnaud, François et tous les politiciens qui partagent leurs opinions à ce sujet d'arrêter de nous montrer du doigt comme si nous étions pestiférés, et de nous respecter comme il se doit.


Pour aller plus loin, vous pouvez lire notamment les articles sur le sujet de Dominique Dupagne, ou du blog du Syndicat National des Jeunes Médecins Généralistes, et ainsi que sur de nombreux autres blogs et sites de médecins. Google est votre ami !
Cette problématique ne concerne pas que la France. Voyons la politique du Québec à ce sujet, chez le Dr Julien !

16 commentaires:

drjulienc a dit…

En 2007 nous étions en grève contre Sarko, comme quoi ça tire de partout.

Je me permet de mettre le lien vers cet article que j'ai écris aujourd'hui qui expose la situation au Québec, qui combine coercitif (on peut s'installer là ou il y a des places) et incitatifs (les zones les plus en souffrance sont fortement récompensés).

http://medecinquebec.wordpress.com/2011/10/07/la-liberte-dinstallation-au-quebec-un-billet-qui-parle-des-prems/

Maxime a dit…

Cher ami, Il n'y aura pas besoin d'user de méthodes coercitives, ni même incitatives. De toutes façons ces dernières sont coûteuses et ont d'ailleurs prouvé leur inefficacité ! l'augmentation du numerus clausus (et même sa suppression envisagée) régleront le problème. En formant plus de 8000 médecins/an, l'objectif est de saturer le "marché" du travail. Pour gagner votre vie, vous ne pourrez plus qu'allez exercer là où vous trouverez suffisamment de patients pour vous garantir un revenu. La logique de marché est une panacée.

Dr YannnSud a dit…

"Finalement, (et croyez-moi je souffre d'écrire ces mots), c'est Ségolène qui me convainc le plus, avec son idée de "dispensaires de médecins salariés"."

Je ne saurais pas mieux dire, en particulier pour cette citation ^^ (dommage que pour le reste elle soit complètement, euh, ailleurs.)

DrYannnSud a dit…

@Maxime : subjectivement ça me branche moyen, mais objectivement c'est sans doute la solution la plus sage et la plus juste. Mais elle impliquerait de lourds investissements de formation, le système actuel étant déjà proche de la saturation au NC actuel.

Anonyme a dit…

Je suis la maman d'un étudiant en médecine et je peux vous dire que jusqu'à présent l'état n'a rien payé en ce qui concerne ses études trés longues.
C'est bien moi qui paye l'inscription à la faculté. D'ailleurs on se demande pourquoi parce que les cours sont si nuls et insignifiants que la plupart des étudiants n'y participent plus.Ils se débrouillent avec internet et les livres que JE paye aussi.
De plus pour compenser la nullité de l'enseignement des facs on propose aux étudiants d'avoir des "conférences" qui sont bien sur aussi payantes.
On le sait en France la sélection se fait par l'argent c'est bien ce qui intéresse le plus nos politiques non ?
Vous prenez n'importe quel stagiaire dans n'importe quel domaine à partir du moment où il fait un stage qui dépasse 2 mois, il est rémunéré aux environs de 400 euros par mois. Un étudiant en médecine ne touche que 200 euros par mois...!
De plus les hôpitaux, donc l'état...sont bien contents d'avoir une "main d'oeuvre" si peu payée...!
Alors imposer un lieu géographique pour travailler au bout de ces 10 ans d'étude, c'est à dire vers la trentaine je trouve que ça serait une bonne motivation ... (c'est du second degré pour ceux qui ne l'auraient pas compris) et un argument qui ne tient pas la route.
Je vais arrêter là mon discours même si j'aurais encore pas mal de choses à dire...
Bon courage pour tes études !

VS a dit…

Anonyme a dit...
"Je suis la maman d'un étudiant en médecine et je peux vous dire que jusqu'à présent l'état n'a rien payé en ce qui concerne ses études trés longues."
Un étudiant à l'université coûte 8790 € par an à l'état.

Docmam a dit…

C'est bien résumé, et je suis entièrement d'accord !
J'ai ptet juste quelques doutes sur les salariés du dispensaire... à voir.

Gélule a dit…

@Anonyme : je ne sais pas d'où vous tirez votre chiffre. J'avais fait des recherches pour mon blog, sur ce lien http://www.education.gouv.fr/cid57096/reperes-et-references-statistiques.html#Budgets,%20co%C3%BBts%20et%20financements on trouve tous les chiffres de l'éducation nationale. En 2005, 8030€/an pour un étudiant en université, 15340€/an pour un étudiant en classe prépa, 10990€/an pour un lycéens.
Je propose que vus les coûts exporbitants des lycéens et leurs cours payés par la société, on les assigne désormais sans choix préalable à une filière professionnelle déterminée en tenant compte des besoins ponctuels du pays. En plus, ça résout le problème du chômage, et chacun "rembourse" à la société la chance qu'il a eu de pouvoir aller jusqu'au bac.

tapas92 a dit…

un argument que l'on oublie souvent, c'est la féminisation de la profession (qui est une bonne chose, là n'est pas a question). vous aurez du mal à obliger une femme-médecin (probablement bientôt mère) de 30 ans à aller travailler dans un "désert médical". Rien contre la féminisation, c'est juste une constatation factuelle.
d'ailleurs, où sont les déserts médicaux : pas si loin que cela, dans la banlieue parisienne, dans la grande couronne certaines villes (et pas villages ) sont déjà sinistrées au niveau médical. Les mères ne trouvent pas de médecins pour examiner leur nourrisson qui a de la fièvre dans les 48 heures, les gardes de nuits et week end et vacances ne sont pas assurées (si vous calculez, cela fait plus de temps sans médecin de ville que avec médecin de ville, cela s'appelle la permanence de soins, mais demander à un docteur qui travaille 70 heures par semaine de faire des gardes en plus ...). Alors, parler de saturation médicale (en réponse à Maxime), on y est loin. La demande médicale est de plus en plus forte : les parents ne tolèrent plus que leur bambins aient le nez qui coule, les personnes âgées sont de plus en plus nombreuses et âgées, les maladies (diagnostic et prise en charge) sont de plus en plus complexes, les patients plus exigents ... Et ce d'autant que, avec la féminisation de la profession (voir plus haut, et de nouveau, rien contre cette féminisation, c'est juste factuel), toutes les amies qui s'installent actuellement en "libéral" se mettent à 2 médecins pour prendre un temps-plein dans un cabinet (dans le discours officiel : qualité de vie oblige, en réalité tâche familiale oblige) : et donc en pratique, la faculté forme 2 médecins pour en avoir qu'un seul à l'arrivée (je parle ici des médecins généralistes, je connais moins bien le cas des spécialistes)
Pour répondre encore à Maxime, ce n'est pas la loi du marché, en mettant en concurrence les médecins qui régulera la situation (augmenter l'offre de soins, c'est augmenter la consommation de soins), mais en ne remboursant plus la santé que l'affaire sera réglée. Mais ça, c'est un autre débat. Et puis augmenter le nombre des étudiants en Médecine, c'est mécaniquement baisser le niveau médical de chacun (par exemple > 85% de réussite au Bac ... on voit le niveau des enfants)
Et puis, il faudra expliquer à la population qu'on ne peut pas avoir les petits oiseaux sur la fenêtre (à la campagne) et le docteur derrière la porte, et qu'il leur faudra faire un choix. C'est vrai pour de très nombreuses professions (école, poste, tribunal, gendarmerie, boulanger ...)
tout cela pour dire que, oui il y a un problème, mais que ce ne sont pas des mesures techniques (incitation, coercition ...) qui vont régler le problème, mais un vrai débat de société : dans quel type de société veut on vivre ?
ouahhh tout à coup le blog devient super-sérieux. Merci pour ton blog qui me fait souvent rire avec tes histoires d'externes

Anonyme a dit…

ah c'est drôle, toute ma vie d'étudiante j'ai entendu "tu fais médecine parce que tes parents peuvent payer"!!! c'était vrai, en l'occurrence, mais j'avais plein de copains qui cumulaient les jobs pour s'en sortir. Les études gratuites... encore un concept bien français, qui relève plus de l'idéologie marxiste que de la réalité. Laissons les primairistes de coté, leurs arguments électoralistes ne reposent sur rien. Ils étaient aux manettes quand par complaisance ils ont refusé -cédants à nos ainés inquiets de garantir leurs revenus- une augmentation du numerus clausus ce malgré l'évidence démographique! aujourd'hui les zones désertiques s'organisent, les patients aussi et rien dans leur propositions ne méritent d'être retenu; comme c'est dit plus haut, nous irons chercher les patients où ils sont lorsque notre nombre sera ... en adéquation avec les besoins de la population

mike de bakey a dit…

Je me suis toujours demandé pourquoi ce seraient des personnes qui ne connaissent rien au domaine de la santé qui peuvent, tout d'un coup, décider de l'avenir d'une population.

L'Apprenti Docteur a dit…

Si je m'attendais à autant de réactions... je vais essayer de répondre à tous.

@Dr Julien : j'ai donc rajouté ton lien que j'avais (honteusement) oublié. Je parle ici des socialistes car ce sont eux qui "font le buzz" en ce moment, je m'opposerais de la même façon à ces idées si elle émanaient de la droite. Je me bats pour le fond et non la forme ! Et puis en 2007, j'étais en P2 donc encore loin de ces problématiques.

@Maxime : Effectivement je pense que dans une dizaine d'années nous commenceront à ressentir les effets de la hausse du numerus clausus. De là à penser qu'il y aura une saturation du marché, je ne pense pas. Le problème est qu'il faut trouver une solution dans l'intervalle, puisque la solution va d'abord empirer avec le nombre de départs en retraites non remplacés par les jeunes arrivants. N'oublions pas que cette situation est en partie liée à la politique d'il y a quelques années, consistant à diminuer le numerus clausus pour limiter le nombre de médecins, et donc limiter les dépenses de soin. Comme si les gens allaient être moins malades et moins consommer des soins parce que les médecins étaient moins nombreux. Nous n'avons pas à payer les pots cassés pour des incompétents sans aucune vision à long terme.

@DrYannSud : je ne peux que plussoyer tes remarques !

@anonyme "maman" : idem. Par contre je rejoins "VS" quand il fait remarquer que l'Etat débourse une somme considérable pour former les étudiants. Je pense que ce que vous vouliez dire est plutôt qu'il n'y a pas d'aides pour les achats de livre, pour le logement et tous les frais incombant aux étudiants longue durée ?

@Docmam : je ne me suis pas dit convaincu à 100%, mais l'idée est à creuser. Evidemment, je ne ferais pas confiance à Ségolène pour mener à bien cette idée, mais accordons lui quand même le mérite de poser la vraie question.

@Gelule : merci pour ces infos et le partage des sources ! Effectivement, imposons un lieu de vie aux lycéens. En fait, empêchons àles gens de déménager, comme ça on msv=tc^à*évite de dépeupler les campagnes et de surpeupler les villes. J'ai une idée, rebaptisons la France... URSF !

@Tapas92 : c'est vrai que la féminisation de la profession n'est pas pour "arranger les choses". Effectivement ça devient un peu sérieux, mais si je préférerais parler comme d'habitude de mes expériences d'étudiant, je ne pouvais pas me taire à ce sujet. J'ai un blog, des gens qui me lisent, autant en profiter pour essayer de faire passer un message et expliquer...

@anonyme : je sais que tout ça fait partie du discours de "je suis le plus beau votez pour moi" et qu'il faut y accorder peu de crédit, mais je me suis senti méprisé et bafoué par ces propos, je ne pouvais donc pas me taire. Et puis comme je disais plus haut, je suis persuadé qu'effectivement le problème va se résoudre de lui-même d'ici quelques années avec l'arrivée d'un plus grand nombre de médecins sur le marché, mais d'ici là, il faut bien faire quelques choses parce que les médecins en milieu "désert" et les patients ne tiendront pas jusque là...

@Mikey : Et oui ça c'est assez dingue, c'est comme le fait qu'avec la loi HPST les décisions à l'hôpital soient prises par des administrateurs et non le corps médical... Comme s'ils étaient mieux placés pour savoir.


A tous, merci pour vos commentaires et les compliments. Et surtout, faites passer le message, c'est le plus important !

Anonyme a dit…

Bonsoir,

je ne pense pas que les études de m´decine soient gratuits, pas plus que les autres études ou formations. Je ne montre non plus du doigt les médecin et leur revenu, je compare le temps d'étude avec leur salaire, ainsi leur frais de fonctionnement (en libéral).

Par contre les "dispensaires de médecins salariés" ressemble beaucoup aux "Ärztehäüser" en Allemagne où des médecins sont des salaries et le patron sont des investisseurs. Le médecin ne sera plus libre de faire son choix selon le besoin du malade, mais selon le CA de son patron.

L'objectif de son patron est de faire du fric tout en faisait des économies aux divers caisses d'assurances de maladie (ici il y en a dans les 300) avec lesquels il a un genre de cahier de charge. Donc la santé de l'assuré/malade est soi-disant l'objectif Nr1 et au fond le dernier soucis de tous et le médecin ne sera qu'un employé avec un salaire fixe.

Un jour le système de santé sera celui du discounter (voire coté en bourse comme le pétrole ou le blé) et cela aura été possible parce que les médecins (et personnel soignant) et les malades-assurés ne lutteront pas ensemble contre une déshumanisation de la prise en charge de la santé, du secteur social.

Le proverbe de diviser pour mieux régenter s'applique ici merveilleusement bien. Dommage, une fois cette position perdu l'Humanité aura perdu ce qui est du bien chez elle.


Bonne soirée et courage pour la suite

Chantal

L'Apprenti Docteur a dit…

Bonjour, comme d'habitude Chantal vos commentaires sont pertinents et intéressants !

Il est évident que si à terme la solution des dispensaires était adoptée, il faudrait faire en sorte que malgré son statut de salarié, le médecin conserve un rôle de décideur. Pour ne pas être soumis à la sécu qui fait pression pour choisir comment prescrire et comment prendre en charge un patient, mais aussi pour ne pas être tributaire des décisions d'un administrateur administratif qui ne connait aucunement les contraintes et les vrais enjeux du métier et de la relation soignant-soigné, comme c'est maintenant le cas dans les hôpitaux français avec la loi HPST.

Je suis persuadé qu'il y a de bonnes choses à faire avec cette idée, mais il faut prendre le temps de réfléchir à la meilleure façon de les mettre en place. Cela passe indéniablement par l'association du travail du corps politique et médical !

complémentaire santé a dit…

je suis entièrement d'accord avec Maxime

Le Petit Docteur / Guillaume a dit…

Salut cher collègue.
La carte de la France que tu mets en illustration est insuffisante pour bien comprendre les phénomènes en cause.
Mieux vaut regarder dans le détail de chaque région, chaque bassin de vie la réalité locale.
Dans ma région (Haute normandie) , 1/4 de mes confrères généralistes vont partir à la retraite dans les 5 ans. Il n'y a eu l'an dernier que 37 inscriptions à l'ordre en médecine générale dont 12..en exercice libéral ou mixte...12.. pour les autres spécialités 28 % des pédiatres partis dans les 5 ans , 39% des psychiatres...
Faite le calcul pour les années à venir ...
Le choc va être difficile. C'est une hémorragie.
Non, les chiffres sont tendus et le marché (arrivée d'un grand nombre de nouveaux médecins grâce à l'augmentation du Numerus clausus) mettra un temps trop long pour corriger les choses suffisamment.
Oui aux maisons de santé avec exercice salarié plus facile à aborder pour des consoeurs désirant avoir des horaires +/- fixes, du fait de la forte féminisation de la profession.
Oui aux politiques d'incitations mais cela n'est pas suffisant.
Plutôt qu'une politique directement négative d'interdiction, on peut imaginer une limitation à l'installation dans les zones surdenses lorsqu'on dépasse le remplacement 1 pour 1 des départs à la retraite..et surtaxer au delà
Oui. les études de médecine coute cher et les étudiants n'ont pas de devoir vis à vis de la nation pas plus ni moins que les confères installés
...mais nous sommes en France dans un système conventionné où l'assurance contre la maladie rembourse les soins médicaux en échange des cotisations des malades.
Aux professionnels qui vivent de ce système en grande partie de répondre aux besoins sanitaires nécessaires.

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